Not just about Hype and Drugs

APPARAT / WALLS
ShitKatapult Records 2007
Avant de devenir l'un des seuls hommes capables de hanter mes moites nuitées avec Moderat, Sascha Ring était le maître d'oeuvre d'Apparat et entretenait sur l'univers de la minimal une domination sans partage. Mais ça, je n'en savais foutrement rien à l'époque. Mais il réussit à m'offrir l'album que j'appelais de mes voeux depuis un bon moment. Electronique, certes, mais clairement influencé par la pop britannique de qualité (Oasis) et la new wave sans les clowneries et les attitudes de poseurs décérébrés. Une pièce de musique savante qui sait rester accessible et qui appelle immanquablement une cohorte de superlatifs. "Arcadia", "Limelight" et ses sonorités toutes en respiration, ronflant comme un B52 au décollage, "Fractales" et sa mélodie aérienne... Romantique, cryptique, psychédélique. En un mot, sublime dans la forme et incroyablement évocateur sur le fond, Walls fait partie des albums qui vous hantent à jamais.

TELEFON TEL AVIV / IMMOLATE YOURSELF
B-Pitch records 2009

Cet album avait clairement sa place dans l'article précédent mais ma vanne serait tombée à l'eau. Car les Telefon Tel Aviv ne sont ni allemands ni Israëliens mais bien des amériques et de Nouvelle Orléans plus exactement, secteur qu'on pensait pourtant assez hermétiques aux expérimentations lounge et minimales... Terre de pragmatisme faisant la part belle aux sonorités rentre-dedans. Monumentale erreur! Cet album est une caresse de plume d'oie sur un croupion de nouveau-né et des morceaux comme "The birds" ou "helen of troy" rappellent inévitablement les grandes heures de l'électro mid 90's et de la pop 80's style. A la limite du kitsh et du has-been mais avec assez de maîtrise pour en faire quelque chose d'unique et addictif; Une errance electro-pop brumeuse qui transpire la tristesse et la mélancolie, comme un signe du destin (l'une des têtes pensantes de TTA est mort deux jours après la sortie de l'album). Vivement conseillé par la maison.
www.telefontelaviv.com

PAUL KALKBRENNER / BERLIN CALLING
B-Pitch Records 2008
Berlin Calling est un film indépendant allemand de Hannes Stöhr narrant l'histoire de DJ Ickarus (joué par Paul Kalkbrenner lui même), un mec qui se brûle un poil trop les narines dans les nuits techno de Berlin.La B.O. du film est à l'image de cette ville : minimale, sexuelle, moite, désenchantée.C'est avant tout une compil' des différents maxis qu'a pu sortir ces dernières années. On retrouve ainsi le Alter Kamuffel qui tape dans la techno suave dès son intro, mais aussi et surtout le magistral Gebrunn Gebrunn avec sa montée démente et ses deux breaks à faire frissonner un dancefloor entier.Le reste du skeud est à l'avenant. On y retrouve cette techno digne du Berghain ("le" club berlinois) avec des tracks vicieuses comme Torted, Atzepeng ou Bengang. A coté figurent des pistes plus mélancoliques comme le magnifique Aaron qui ouvre le disque avec son sample de guitare. Ces deux univers se croisent, se cherchent et finissent pas copuler sur le titre phare de cette B.O. : Sky & Sand, une bombe deep-house subtilement progressive.Un disque de minimal tout simplement sublime. Un grand film. Un acteur / DJ / producteur au charisme démesuré. La bande-son idéale des petits matins blêmes.

BOYS NOIZE / POWER
Boys Noize Records 2009
Boys Noize, de son vrai nom Alexander Ridha, est un producteur et DJ allemand, pilier de la scène berlinoise, au même titre que Paul Kalkbrenner. Tantôt mélo, tantôt clairement rentre-dedans, cet album me laisse globalement froid si l'on excepte "Gax", incroyable matraquage des sens, mi émo mi électro. A enchaîner avec "Add this Song" de GusGus, histoire de s'échauffer les chevilles en douceur. Et puis, un mec qui se fait connaître sur un single savamment intitulé "Don't Believe the Hype" ne peut pas être fondamentalement mauvais. Ou alors j'y connais rien. On me signale que c'est le cas. Tristesse.

MODERAT / MODERAT
B-Pitch Records 2009

Le jour où j'ai acheté ce disque (dans des circonstances déjà évoquées dans le DV#02), j'étais proprement infoutu de reconnaître ce fameux supergroupe encensé par la presse spécialisée européenne. Deux gaziers de Modeselektor (électro pour dancefloors trop propres) et Sascha Ring, petit génie de l'IDM aux accents pop éthérés (un sacré compositeur!). Ni les uns, ni l'autre ne me faisaient vraiment bander, pour une raison plutôt valable: je ne connaissais absolument rien à l'électro, quelle qu'elle soit. Bon j'avais déjà trainé mes moustaches dans le low-fi / shoegaze hérité d'Eluvium ou du label Anticon mais rien ne laissait augurer un tel coup de rasoir dans mes convictions d'activiste punk et affiliés. Croyez moi, je n'ai rien écouté de plus évocateur, brumeux, atmosphérique, massif (avec le deuxième Red Sparowes, dans un registre radicalement opposé), jouissif, excité du bulbe et des méninges. Je considérais l'électro comme une musique de myopathes atrophiés au nombrilisme cras, pas comme le médium privilégié de véritables artistes. Bon sang, quelle classe! Un album ultra-contextuel, urbain, industriel, sombre et progressif (Apparat) ou carrément percutant, fusionnant les styles les plus improbables (Modeselektor). Un disque incomparable et formidablement bien troussé enfilant les mélodies comme des perles. Un grand coup de saton dans les gencives.